Rentrée scolaire 2022

Les violences scolaires dans le Var la semaine de tous les dangers

By TV83.info -Sep 2, 20220

La rentrée scolaire vient d’avoir lieu. La semaine qui suit, du  5 au 12 septembre est celle que les  pédopsychologues appellent « celle de  tous les dangers ». C’est le moment où les  écoliers et lycéens, garçons et filles s’observent, s’évaluent, se mesurent, s’acceptent ou se rejettent. C’est là que peuvent se manifester les premiers signes  d’atteinte à l’intégrité physique et mentale des enfants.

Comment se manifeste la violence à l’école ?
Ce sont des attitudes surtout collectives. La violence est un moyen par lequel le groupe se différencie et s’affirme contre les autres. Ces   manifestations sont multiples, bourrades, voies de fait comme jeter quelqu’un par terre, des coups, des dommages aux biens, des insultes sexuelles, vols, rackets, représailles, intimidations, moqueries, agressions verbales…autant de violences individuelles ou collectives devenues le lot de quelques établissements scolaires. Et pas uniquement dans des zones dites sensibles. Tout espace collectif peut être concerné par ce phénomène social.

Pourquoi la violence ? les raisons traditionnelles
Certaines raisons sont traditionnellement avancées pour expliquer la violence des jeunes en particulier en milieu scolaire :
-Les lacunes de la socialisation, processus qui freine la violence par l’intériorisation des normes et des valeurs ;
-La libéralisation des mœurs qui conduirait à penser qu’il n’y a que des droits et pas de devoirs ;
-Les carences affectives et éducatives (l’éducation constituant un rempart interne contre la violence) ;
-Des sanctions insuffisantes ou inadaptées, (le contrôle social constituant un rempart externe contre la violence)
-Le déclin de l’autorité des parents ;
-La désagrégation des valeurs des cultures traditionnelles chez certaines populations sans intégration des nouveaux modèles ;
-La déperdition des valeurs de civilité, solidarité, et respect d’autrui ;
-Un système de société libérale qui est lui-même fait de violence et de compétition
-L’échec scolaire et les dévaluations personnelles qu’il entraîne ;

Les nouvelles causes
Outre ces facteurs communément admis, d’autres raisons sont aujourd’hui évoquées
-La massification et l’hétérogénéisation scolaire. La démocratisation de l’enseignement a fait apparaître dans les collèges et les lycées un nouveau public qui ne connaît pas les codes implicites de la discipline et des contraintes du système scolaire.
-Le croisement entre la massification scolaire et la crise économique suivie de la crise du covid. Dans de nombreux établissements, des jeunes sont issus de familles touchées par le chômage, la pauvreté ou la maladie.
-La non-adaptation du système scolaire à ces évolutions sociales ;
-La forte distance sociale et culturelle entre les enseignements et leurs nouveaux publics
-La perte du sentiment chez les élèves et parfois chez les enseignants de l’utilité des études et des diplômes en période de crise
-Parfois le prolongement des conduites délictuelles de la rue dans l’école.

Les préventions de la violence scolaire.
La complexité du phénomène induit donc une complexité des réponses apportées.
Les pouvoirs publics mettent ainsi régulièrement en place des plans pour lutter contre la violence à l’école. Il y a  quelques jours le ministre Pap Ndiaye et le président de la République Emmanuel Macron en ont fait une cause nationale lors de la rentrée 2022 s’adressant directement aux élèves « futures victimes » ce qui est l’aveu implicite de l’ampleur du  malaise.

Parmi les pistes de réponse certaines ont été plus ou moins heureuses :
-La responsabilisation des parents, suspension des allocations familiales en cas d’absentéisme scolaire
-Le renforcement de la « gestion des conflits » dans les formations initiales et continues des professeurs ;
-Le renforcement du sens des sanctions : le principe de l’exclusion de la classe ou de l’établissement doit être exceptionnel  et motivé par écrit à l’élève (c’est un leitmotiv de la conception française de la sanction)
-Le maintien de la sanctuarisation contre la violence des établissements scolaires : les collèges et lycées identifiés comme les plus soumis aux intrusions et aux violences peuvent se voir affecter des policiers ou des gendarmes référents, bénéficier de clôtures, de système de vidéo-surveillance et de portails électroniques.

Cette sanctuarisation des établissements est d’ailleurs toujours fortement décriée  par tous ceux qui dénoncent des écoles-prisons et préféreraient plus de présence adulte au sein des établissements.

Un programme pour l’innovation, l’ambition et la réussite s’est assez bien généralisé dans les collèges et lycées. Il donne aux établissements une plus grande autonomie en terme pédagogique et de gestion des ressources humaines, afin de rétablir un climat scolaire propice à la réussite.

L’ennui en classe
Un proverbe hébreux déclare que l’avenir du monde est suspendu au  bonheur des enfants qui vont à l’école. J’ajoute d’expérience que la principale cause de  violence  scolaire est l’ennui en classe. La conscience du décrochage est perçue par le cerveau des élèves comme une douleur qui les pousse à mettre en place des stratégies d’évitements, parfois perturbatrices et agressives. Le système devrait combattre cet ennui, sans nuire à la rigueur des apprentissages.

L’importance des médias et leur amplification
Malgré les meilleures volontés, les diverses politiques de lutte contre la violence scolaire qui se sont succédées depuis dix ans n’ont pas résolu le problème qui continue à faire la une des journaux à chaque nouvelle agression dans une enceinte scolaire.

Ces atteintes aux symboles institutionnels et aux valeurs républicaines qui constituent le fondement de notre société ne sont pas le seul fait des adolescents. Cependant elles sont considérées comme plus graves lorsqu’elles sont commises entre 10 et 18 ans parce qu’elles sont un aveu d’impuissance de notre société, d’autant qu’elles sont fortement relayées et parfois amplifiées par les réseaux sociaux et chaines de TV qui les instrumentalisent.

Écoutons Sénèque !
En son temps le philosophe Sénèque faisait remarquer que l’on ne peut  écraser la violence à Rome (déjà !) qu’entre deux mâchoires légales : le sentiment  que la loi protège  toujours les victimes et la certitude que la loi punit toujours les méchants.

Donc en cette semaine décisive pour le positionnement des jeunes français en milieu scolaire, ils doivent savoir et leurs parents aussi, que la loi est là pour les protéger s’ils sont victimes de violence. Et ceux qui commettent des délits doivent savoir, et leur parents aussi, que la loi est là pour les punir en cas de faute.

Ce que Sénèque percevait déjà, c’est que le mode de  société dans lequel baigne l’enfant peut construire des monstres. Car la violence des  adolescents est à l’image de celle des adultes.

Si tu veux la paix des enfants change la société des adultes disait-il : « si vis liberorum pacem mutare societas adultorum »

Jean François Principiano

https://www.education.gouv.fr/non-au-harcelement/je-suis-victime-de-harcelement-323011